mercredi 29 novembre 2023
L'expérience d'un média en ligne de confiance

EN 2021, PEUT ON PARLER D’UN ETAT HAΪTIEN?

Par INSERTION DEMANDÉE
EN 2021, PEUT ON PARLER D’UN ETAT HAΪTIEN?

L’Etat par sa définition étymologique, vient du latin Status qui signifie position, situation, ce qui est debout, source de sa grandeur et de son inaccessibilité marquées par le rituel protocolaire qui accompagne sa présence et ses symboles (l’hymne national, le drapeau) et qui s’adresse aussi à ces représentants.

Il s’est vu octroyer la forme majuscule dès le XVe siècle. L’Etat moderne apparu au XVIe siècle, a été proposé par plusieurs approches conceptuelles, donne lieu à sa théorisation dans la pensée politique et juridique. Parmi ces approches conceptuelles, il y en a celles qui déterminent l’origine de l’Etat et d’autres qui le critiquent. Selon les théories de l’origine naturelle, l’Etat est le résultat d’un processus naturel à l’opposé de la théorie du contrat social où l’Etat a une origine contractuelle.

D’autant plus, l’Etat a fait l’objet de plusieurs critiques de la part du courant libéral, qui se méfie du pouvoir, souhaite que son rôle se limite à de grandes fonctions de portée générale, il s’agit dans ce cas d’un Etat minimalitaire. Cet Etat gendarme s’oppose à l’Etat
providence dont ce dernier est un Etat interventionniste, qui ne se cantonne plus dans ses fonctions régaliennes mais qui intervient dans le domaine social et économique.

D’autres insistent sur la nature oppressive de l’Etat tels le courant marxiste qui veut que les prolétaires s’emparent de l’Etat
au cours de la révolution, et les anarchistes qui font de l’Etat le mal absolu, pour eux il est nécessaire de détruire l’Etat qui fait obstacle à l’égalité matérielle entre les individus.

Pour mieux appréhender l’objectif de ce texte, il convient d’analyser les caractéristiques d’un Etat qui occupe une place importante dans la théorie générale du droit constitutionnel. Selon Raymond
Carré de Malberg, dans son ouvrage Contribution à la théorie générale de l’Etat, l’Etat se définit comme: “Une communauté d’hommes, fixée sur un territoire propre et possédant une organisation d’où résulte pour le groupe envisagé dans ses rapports avec ses membres une puissance supérieure d’action, de commandement et de coercition”.

De cette définition, nous pouvons soulever trois éléments qui déterminent les conditions d’existence de l’Etat. Pour qu’un Etat existe, ces trois conditions doivent être réunies à savoir le territoire, la population ou la nation, et l’organisation des pouvoirs publics.

Nous pouvons constater qu’Haïti dispose d’une communauté
d’hommes qui s’est regroupée pour vivre ensemble, il est aussi constitué d’un territoire qui est l’étendue géographique sur laquelle s’exerce l’autorité souveraine et exclusive de l’Etat. Le dernier élément qui doit constituer un Etat est une organisation politique englobant l’ensemble des pouvoirs publics. Suivant les articles 88, 133, et 173 de la constitution de 1987, l’Etat haïtien doit être disposé de trois pouvoirs notamment le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et celui judiciaire.

Ces pouvoirs, afin d’exercer leurs fonctions, doivent se conformer strictement aux exigences constitutionnelles et légales. D’abord, le pouvoir législatif pour qu’il exerce pleinement ses attributions disposées par la constitution de 1987, doit constituer des deux chambres représentatives qui sont la chambre des Députés et un Sénat.

Ensuite, le pouvoir exécutif doit être exercé par un Président de la République et un Premier Ministre. Enfin, le pouvoir judiciaire est
exercé par la Cour de Cassation, les Cours d’Appel, les Tribunaux de première instance, les Tribunaux de Paix et les Tribunaux spéciaux.
Ainsi, nous pouvons déduire actuellement que l’organisation politique de l’Etat haïtien ne s’est pas conformée aux exigences prescrites par la constitution de 1987.

Premièrement, tous les objets d’intérêt public doivent être executés par des lois qui sont l’oeuvre du parlement, or depuis le 13 janvier 2020, le parlement n’est pas constitué faute de l’absence des Députés et du 2/3 des Sénateurs.

Deuxièmement, le pouvoir exécutif doit s’assurer de dirriger ou d’administrer le pays par le Président de la République et le Premier Ministre, malheureusement depuis le 7 juillet 2021, il n’y a pas un chef d’Etat, malgré qu’il y a un Premier Ministre, ce dernier n’a pas obtenu d’un vote de confiance devant l’organe législatif. Dernièrement, le pouvoir judiciaire, pour son administration et son contrôle, dispose d’un Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire dont
l’installation récente de ses nouveaux membres a dû être procéder contrairement aux dispositions de l’article 7 de la loi du 13 novembre 2007 créant le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire.

Au regard du droit international public, on admet aussi l’existence d’un Etat par sa reconnaissance internationale, que le gouvernement soit légitime ou non. L’Etat peut se doter des institutions de son choix en application du principe d’autonomie constitutionnelle. Le droit international public exige de l’effectivité du gouvernement, il ne formule par contre aucune exigence quant à la nature du régime politique. Pour que l’Etat soit effectif, il doit donc disposer de la capacité réelle d’exercer toutes les fonctions étatiques, y compris le maintien de l’ordre et de la sécurité à l’intérieur, et l’éxécution des engagements extérieurs.

Entre autres, deux positions opposées sont issues de deux doctrines différentes pour la reconnaissance d’un gouvernement. Conformément à la position réaliste isuue de la “doctrine Estrada” de 1930, revendiquée par Genaro Estrada, ministre mexicain des Affaires étrangères dans les années 1930, elle reconnait les Etats et non pas les gouvernements en se référant à l’effectivité du gouvernement et non à la morale. Contrairement, à la “doctrine Tobar” de 1907, affirmée par Carlos Tobar, ministre équatorien des Affaires étrangères dans les années 1900, laquelle privilégie
la légitimité démocratique.

Ainsi, le gouvernement haïtien actuel (Gouvernement Dr. Ariel Henry) n’est pas légitimé démocratiquement, mais suivant la doctrine Estrada, il peut bien se reconnaître par d’autres Etats.
Cependant, le gouvernement haïtien ne dispose d’aucune effectivité car le seul organe politique représentant l’Etat n’est pas en mesure d’exercer réellement leur autorité. Pour qu’un gouvernement puisse être effectif, il faut qu’il dispose du monopole de la force et de la contrainte qui peut le distinguer des autres groupements ou individus. Le gouvernement haïtien doit être en mesure de garantir les droits-libertés et les droits-créances de ses citoyens notamment le droit de circuler librement, le droit à la sécurité et à la sûreté, le droit à la vie.

Malgré la bonne foi de plusieurs autorités politiques pour le retour à cette personne morale souveraine dotée de la force légitime, il convient d’admettre en l’absence d’une organisation politique en Haïti qui est l’une des conditions essentielles d’existence d’un Etat et l’inneffectivité du gouvernement haïtien, nous doutons jusqu’ici l’existence d’un Etat haïtien.

Jn P. Bernedly Leonard
Juriste, Licencié en Droit
bernedlyjuriste@gmail.com

LIRE AUSSI

PressLakay
Are you sure want to unlock this post?
Unlock left : 0
Are you sure want to cancel subscription?