Dans ce contexte marqué par le conflit diplomatique entre Haïti et la République Dominicaine à cause de la construction du canal d’irrigation à Ouanaminthe, l’historien Michel Soukar reconnaît la nécessité d’un tel projet pour relancer la production nationale. Par ailleurs, il a aussi critiqué les hommes politiques locaux d’avoir transformé le pays en une véritable province commerciale dominicaine.
Alors que la tension diplomatique entre les deux pays qui partagent l’île d’Haïti [Hispañola, pour les Dominicains] reste à son comble, nombreux sont les personnalités de la société civile dans le pays comme partout ailleurs qui opinent, analysent et dénoncent les faits. Si les pourparlers entre les dirigeants des deux nations sont au point mort, tandis qu’un appel au dialogue a été lancé par les autorités haïtiennes ainsi que la Communauté internationale, certains restent convaincus que l’attitude des Responsables dominicains est due au fait qu’ils n’ont aucun respect pour le peuple haïtien. Partant de cette idée, l’historien Michel Soukar a fait savoir qu’il est maintenant temps que les Haïtiens se décident à “faire“ un pays.
Intervenant à l’émission « Le Point » sur la Radio Télévision Métropole, jeudi 28 septembre 2023, l’historien, écrivain et journaliste haïtien n’a pas manqué l’occasion de critiquer ouvertement les politiques qui ont conduit le pays dans cette voie désastreuse. Il a aussi rappelé à ses compatriotes leur devoir en ce qui a trait à la mise sur pied d’un état souverain.
“C’est nous-mêmes Haïtiens qui devons décider de faire un pays (…) On peut considérer ce qui se passe à Ouanaminthe actuellement comme un élan magnifique qui peut nous mener, effectivement, sur la bonne voie, mais il ne peut demeurer ainsi car il faut beaucoup plus qu’un élan pour faire un pays” a-t-il déclaré.
“Nous [Haïtiens] devons définir ce que nous voulons réellement (…) Quel type d’économie voulons-nous adopter? Quelle politique en matière d’éducation voulons-nous mettre sur pied? Ces questions et tant d’autres ne concernent pas seulement un leader, c’est la responsabilité de nous tous. En tant qu’Haïtiens qu’est-ce que nous voulons ?” a poursuivi l’historien qui soutient que l’heure n’est pas aux slogans à tendance patriotique.
Parallèlement, M. Soukar a admis que le pays n’a actuellement aucun dirigeant et que le peuple haïtien demeure seul face à son destin. Quant à la fermeture de toutes les frontières terrestre, maritime et aérienne par les autorités dominicaines, il a admis que ces dernières sont obligées de les rouvrir bien qu’en prenant d’autres dispositions en ce qui a trait aux traitements des Haïtiens qui viendront chez eux.
“Le Président dominicain Luis Abinader l’a bien indiqué lors de ces dernières interventions. Dans deux à trois semaines, il sera plus flexible bien qu’après la gestion de la frontière par les Dominicains se fera autrement. Rappelons bien que le Chef d’État dominicain avait souligné que son gouvernement allègue une bonne partie de son budget en soutien aux services de maternité aux femmes haïtiennes” a-t-il dit.
Cependant, toujours en ce qui concerne la fermeture des frontières causant la suspension des activités commerciales entre les deux pays, Michel Soukar se dit convaincu que les Haïtiens peuvent saisir une opportunité dans cette situation à savoir relancer la production nationale biaisée depuis des lustres à cause du commerce unilatéral de denrées alimentaires entre Haïti et la République Dominicaine.
“ Il est grand temps que le pays ne soit plus une province commerciale Dominicaine. Que les dirigeants prennent leurs responsabilités ” a-t-il soutenu.
Près de 15 jours depuis que toutes les frontières terrestre, maritime et aérienne sont restées fermer, rien n’indique, jusqu’à présent, que des solutions seront trouvées de l’un comme de l’autre côté de l’île. Alors que les autorités dominicaines sont restées fermes sur leurs décisions, les paysans haïtiens impliqués dans la construction du canal ont fait désormais de cette dernière une cause nationale. Donc, il n’est point question d’abandonner comme indique leur slogan “KPK”. Est-ce que la production Nationale sera bel et bien relancée ? C’est là la question.