Pénurie de dollars | L’économiste Enomy Germain apporte des précisions

Enomy Germain, économiste

Pénurie de dollars | L’économiste Enomy Germain apporte des précisions

Depuis plusieurs jours, les banques en Haïti ne sont pas en mesure d’assurer les retraits en dollars. Une situation qui provoque des altercations entre clients et caissiers. L’Association Professionnelle des Banques (APB) avait sorti une note pour aviser le public en général de ce problème récurrent dans le système bancaire haïtien. Ce vendredi, l’économiste Enomy Germain en a apporté des précisions.

Enomy Germain, économiste
Économiste Enomy Germain

Alors que la rareté du dollar persiste dans les banques en Haïti, celles-ci ont pris des mesures restrictives qui consistent à imposer des limites dans les retraits en cette devise. Une décision qui ne plaît pas aux nombreux clients qui possèdent un compte bancaire en dollars. Si, dans plusieurs banques, certaines femmes se dévêtissent devant les comptoirs pour protester contre cette mesure jugée « mafieuse », d’autres membres de la clientèle font tout simplement des scènes mettant ainsi les personnels du service dans l’embarras. Des mouvements de protestation qui, toutefois, ne résout pas le problème.

Intervenant au journal « Premye Okazyon », ce vendredi 28 avril 2023, l’économiste Enomy Germain a expliqué qu’il s’agit plutôt d’un problème du numéraire ou la forme imprimée du dollar et non l’indisponibilité de ce dernier. Il a avancé plusieurs causes de ce phénomène notamment un problème structurel par le fait que le pays n’a pas mobilisé suffisamment de devise, mais aussi un problème lié aux coefficients de réserves obligatoires.

« La rareté du dollar dans le système bancaire haïtien est plutôt un problème du numéraire. Haïti n’a pas mobilisé suffisamment cette devise pour pouvoir se satisfaire. Pour qu’il y ait une régulation dans l’économie, le pays a besoin près de 5 milliards de dollars », a indiqué l’économiste.

« Normalement, Haïti ne reçoit que 3 milliards par les transferts effectués par la diaspora. Une tendance qui est plutôt en baisse depuis l’année dernière, encore plus, depuis le début du programme Biden », a-t-il poursuivi.

D’un autre côté, M. Germain a mentionné qu’en plus des 3 milliards perçus par les transferts effectués, ce qui est insuffisant, l’économie perçoit aussi un milliard de dollar dans l’exportation des produits provenant de la sous-traitance. Ce qui fait 4 milliard de dollars. Donc, l’économie haïtienne a un déficit d’un milliard de dollar pour se satisfaire.

« Dans le temps, les investissements directs étrangers permettaient de combler ce déficit. Cependant, depuis 2018, ces derniers ont chuté. Par exemple, pour l’exercice 2017-2018, l’économie a perçu 375 millions de dollars grâce aux investissements directs étrangers alors qu’en 2020, celle-ci a seulement gagné 30 millions. Des chiffres avancés dans un rapport du CNUCED (Conférence des Nations-Unies pour le Commerce et le Développement). À noter que ce dernier ne mentionne aucun chiffre pour Haïti en ce qui renvoie au dernier exercice.  » a expliqué l’économiste.

Parallèlement, M. Germain a souligné que le tourisme permettait aussi de combler le déficit. Ce dernier rapportait au pays 600 millions de dollars (depuis 2014). Il a indiqué que depuis les 6 et 7 juillet 2018, ce secteur n’existe plus en Haïti et que l’économie haïtienne en paie les frais.

« Ce qui fait qu’aujourd’hui, le pays a « une lacune » de 2 milliards de dollars à satisfaire. Ce qui conclut qu’il existe bel et bien un manque de cette devise », a-t-il soutenu.

Expliquant les causes liées aux coefficients de réserves obligatoires, l’économiste a indiqué que sur chaque dépôt de 100 dollars effectués dans les banques en Haïti, celles-ci gardent seulement 53 dollars (53%). Car les coefficients de réserves obligatoires permettent, entre autres, à la BRH de gérer la quantité d’argent qui circule dans l’économie.

« Dans ce cas, un client qui a effectué un dépôt de 100 dollars ne trouvera que 53% de son argent au cas où il vient le retirer. Ce qui veut dire que le coefficient de réserves obligatoires est aussi une cause de la rareté du dollar. » a expliqué aussi l’économiste Enomy Germain qui a également mentionné la vente du dollar par les banques dans le secteur informel.

La rareté du dollar dans les banques en Haïti est un problème récurrent auquel fait face leur clientèle. À côté de la monnaie locale [la gourde] qui se dévalorise au quotidien mettant ainsi tout le monde en quête d’autres devises étrangères, maintenant, le problème de la pénurie de dollars vient empirer les choses.

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